Associations : la rémunération des dirigeants

Associations janvier

La non-lucrativité, principe de base du monde associatif, n’interdit cependant pas la rémunération des dirigeants associatifs. Celle-ci, néanmoins, doit respecter un certain nombre de conditions. 

Par ailleurs, nous nous intéressons dans cet article à une autre question qui a trait au financement des associations. Devant la baisse régulière de certaines subventions, un discours général s’est développé depuis plusieurs années pour appeler celles-ci à « diversifier » leurs recettes ou à mettre en place ce qu’il est convenu d’appeler l’hybridation de leurs financements. Dans cette optique, l’appel à la générosité publique est de plus en plus sollicitée. Un décret récent vient d’apporter des précisions quant à la mise en place de telles opérations.

Traditionnellement les dirigeants d’une association exercent leurs fonctions à titre gracieux. Toutefois, il existe des possibilités de voir les dirigeants d’une association rémunérés, entre autres lorsque le budget de l’association le permet. Pour être légale et ne pas entacher le caractère désintéressé de l’association, cette prérogative doit être prévue par les statuts de ladite association et appliquée dans le strict respect de la réglementation en vigueur.

 

Deux possibilités légales

 

A. Les trois quarts du Smic, une tolérance fiscale

Si certaines catégories d’associations (reconnues d’utilité publique) excluent la possibilité de rétribuer les dirigeants, la réglementation fiscale admet toutefois l’opportunité, pour les bénévoles ayant des fonctions d’administration ou pour ceux assurant un travail indépendant, la mise en place d’une compensation financière. Deux cadres légaux permettent de rémunérer des dirigeants, sans remettre en cause la notion de « gestion désintéressée » de l’association. Le premier est accessible à toutes les associations d’utilité sociale depuis 1998 et repris dans le cadre d’une instruction fiscale de 2006. Celle-ci prévoit une rémunération des dirigeants dans la limite des trois quarts du montant du Smic (soit, pour 2018, 1 123 € bruts mensuels). à noter que les montants versés au titre de cette rémunération sont soumis aux charges sociales (TNS) et sont comptés dans l’assiette de calcul de l’impôt sur le revenu du bénéficiaire. Il est par ailleurs possible dans le cadre d’un cumul de fonction qu’un administrateur de l’association soit aussi salarié de la même association. Dans ce cas de figure, l’activité salariée doit être distincte de la fonction bénévole mais aussi répondre aux critères du salariat parmi lesquels l’existence d’un lien de subordination.

 

B. Grandes associations, la limite de trois fois le PSS (plafond de la sécurité sociale)

Pour les grandes associations, les dirigeants sociaux doivent pourvoir s’y consacrer à plein temps et bénéficier de rémunérations qui peuvent aller jusqu’à près de 10 000 € par mois, comparables à celles de cadres supérieurs. On ne peut plus être président d’une grande ONG qui emploie des milliers de personnes dans des pays en guerre et faire cela le soir en plus de son cabinet médical ou de son activité de chirurgien... Pour pouvoir rémunérer ses dirigeants tout en conservant son caractère désintéressé, une grande association doit respecter quatre conditions principales : la transparence financière ; le fonctionnement démocratique ; l’adéquation de la rémunération aux sujétions des dirigeants ; et le respect du plafond de la rémunération. La transparence financière implique que la décision de rémunérer un dirigeant soit prise lors de l’assemblée générale à la majo-rité des deux tiers des membres présents ou représentés qui fixe, hors de la présence du dirigeant concerné, le niveau de rémunération. Ces rémunérations doivent apparaître dans une annexe aux comptes de l’association et être présentées à l’assemblée générale. Dès lors, la certification des comptes par un commissaire aux comptes devient obligatoire. Ensuite, le critère d’un fonctionnement démocratique correspond essentiellement à l’élection démocratique des dirigeants et à un contrôle de la gestion de l’association par ses membres. L’adéquation entre rémunération et sujétions des dirigeants est acquise si la rémunération correspond à des responsabilités et une activité effectives. Enfin, concernant le plafond des rémunérations, l’article 261- 7,1°, d, du Code général des impôts prévoit la possibilité, pour les associations dont les recettes (hors subvention) sont supérieures à 200 000 €, de dépasser le plafond des trois quarts du Smic sur la base d’un régime dérogatoire. Le montant des ressources à prendre en compte est le montant moyen constaté au cours des trois exercices précédant celui au cours duquel la, rémunération est versée. Aucun dirigeant ne peut être rémunéré si les ressources de l’association sont en dessous de 200 000 €, un seul entre 200 000 et 500 000 €, deux entre 500 000 et 1 000 000,/nbsp]et trois au-delà. Dès lors, la rémunération mensuelle du président est plafonnée à trois fois le montant du plafond de la Sécurité sociale (actuellement 3 311 € mensuels) soit 9 933 € mensuels en 2018. Cette rémunération n’est pas cumulable avec la tolérance des trois quarts du Smic.

 

Cas des associations de jeunesse et d’éducation populaire

La loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté confirme la possibilité de rémunération des dirigeants au-dessus de la limite des trois quarts du Smic et facilite son application pour les associations de jeunesse et d’éducation populaire (JEP). En application de cette loi, ces associations peuvent rémunérer leurs dirigeants quelle que soit l’origine des ressources de l’association. Cet assouplissement s’accompagne de trois conditions restrictives :

  • l’instance dirigeante doit être composée de membres dont la moyenne d’âge est inférieure à trente ans,
  • ne peuvent être rémunérés que les dirigeants âgés de moins de 30 ans à la date de leur élection, pour une durée maximum de trois ans renouvelable une fois,
  • le plafond de rémunération est abaissé, il est limité à une fois le plafond de la Sécurité sociale soit 3 311 € par mois en 2018.

Pourquoi rémunérer un dirigeant ?

La possibilité de rémunérer les fonctions d’administrateur contribuerait à rendre la fonction plus attirante. En effet, lorsqu’un élu associatif consacre beaucoup de temps et d’énergie à une association, assume des responsabilités lourdes de gestion de personnel ou budgétaire, intervient dans la conduite des activités de l’association, il peut légitimement se demander si cette charge ne mériterait pas une rétribution. Pour les associations qui en ont les moyens, proposer une rémunération peut être une option pour susciter l’intérêt d’un poste à responsabilités. De plus, proposer une rémunération pourrait faciliter l’accès des jeunes aux fonctions dirigeantes (ref. Loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté pour les associations de jeunesse et d’éducation populaire).

 

Quelles limites ?

Rémunérer les élus associatifs pourrait présenter le risque de faire apparaître l’association comme une entreprise comme une autre. Cela pourrait avoir pour effet la démobilisation des adhérents qui s’investissent bénévolement et altérer la confiance des personnes qui apportent des dons à l’association. Les donateurs sont généralement attachés à ce que leur contribution soit essentiellement utilisée pour les actions de l’association et peuvent douter de l’intérêt et la nécessité de rémunérer des administrateurs. Des financeurs publics de l’association peuvent aussi se montrer réservés face à cette situation, d’où l’intérêt de jauger le niveau d’acceptabilité d’une telle décision tant en interne qu’en externe.

 

En savoir plus :
Article 261-7-1°d du Code général des impôts (CGI) http://bit.ly/2ByiKOu
Article L.241-3 du Code de la sécurité sociale (CSS) http://bit.ly/2khkpnY
Bulletin officiel des finances publiques-impôts BOI n° 208 du 18 décembre 2006 BOI 4H-5-06 : http://bit.ly/2nqDHIX
Bulletin officiel des finances publiques-impôts BOI–ISCHAMP-10-50-10-20-20170607 publié le 07/06/2017 : http://bit.ly/2jMXLQv
Article 12 de la loi n°2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté : http://bit.ly/2igSekS

Brèves 

Mise à jour du Guide du Bénévolat

 

Le Guide du Bénévolat 2017-2018, édité annuellement a été actualisé. Cette publication, à destination de tous les bénévoles recense le cadre juridique et tous les droits du bénévolat (congés, dispositifs de formation, responsabilités civile, pénale et financière...). Il est accessible en ligne ou sur papier. http://bit.ly/2xjj8xu

 

L’entrave à la liberté d’association doit être caractérisée pour être reconnue

Suite à un changement de serrure d’un local associatif et la pose d’un cadenas sur le portail d’un terrain qu’elle occupait, une association a engagé une procédure contre une autre au motif d’entraver la liberté d’association en s’appuyant sur l’article/nbsp]431-1 du Code pénal. Celui-ci dispose en effet que « le fait d’entraver, d’une manière concertée et à l’aide de menaces, l’exercice de la liberté d’expression, du travail, d’association, de réunion ou de manifestation est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000€ d’amende ». En l’espèce, la Cour de cassation a estimé que le délit n’était pas suffisamment caractérisé, précisant que la menace s’entendait comme « une violence physique ou au moins un acte d’intimidation inspirant la crainte d’un mal ». Cour de cassation, chambre criminelle, 28 juin 2017, n° 16 84423 http://bit.ly/2j7QE8O

 

Un guide pour protéger vos données personnelles

La commission nationale informatique et libertés (CNIL) a publié un guide pour que les associations se mettent en conformité avec la loi n° 78-17 et le règlement général sur la protection des données. Les étapes à suivre sont explicitées et détaillées. Il s’agit de recenser les traitements de données à caractère personnel, automatisés ou non, d’apprécier les risques engendrés par chaque traitement, de mettre en oeuvre, de vérifier les mesures prévues et aussi de réaliser des audits de sécurité périodiques. Des fiches thématiques, au nombre de 17, indiquent les précautions à prendre. http://bit.ly/2hsv1wi

 

Un centre équestre exonéré de sa responsabilité
Alors qu’il accomplissait un exercice de surveillance de balisage d’un chemin, un titulaire du niveau « galop 7 » et d’un diplôme « activités hippiques » a été victime d’un accident provoqué par la chute de son cheval. Il a alors assigné le centre équestre en responsabilité et indemnisation. Or celui-ci a été exonéré de sa responsabilité dans la mesure où il n’avait pas manqué à son obligation de sécurité et de prudence à l’égard du cavalier. Les juges ont aussi estimé que le cavalier était en mesure, à ce niveau de qualification, de veiller à sa propre sécurité. Cour de cassation chambre civile 1, jeudi 22 juin 2017, n° 16-20791 http://bit.ly/2xXSONk


Conditions requises pour une signature électronique
L’article 1367 du Code civil dispose que la fiabilité d’une signature électronique est présumée lorsqu’elle est créée dans des conditions techniques précises. Le décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 détaille les pré-requis. Ces conditions assurent également l’identité du signataire et garantissent l’intégrité de l’acte. http://bit.ly/2gPNGRJ

 

Un nouveau Cerfa pour les accidents du travail
Le formulaire Cerfa N°14463*03 doit être utilisé pour réaliser les démarches et déclarations auprès de l’administration en cas d’accident du travail ou de trajet d’un de ses salariés ou de ses bénévoles (lorsque ces derniers ont été déclarés et peuvent bénéficier de ce régime). Ce formulaire obligatoire est accessible en ligne sur les sites internet www.ameli.fr et www.service-public.fr et/ou impression et sur www.netentreprises.fr pour télé-déclaration. Arrêté du 26 septembre 2017 fixant le modèle du formulaire « Déclaration d’accident du travail ou d’accident de trajet » http://bit.ly/2zfFjaB

 

Règlement des fédérations sportives : en ligne dès le 1er janvier 2018

Les fédérations sportives devront publier leurs règlements et décisions réglementaires sous forme électronique, à partir du 1er janvier 2018. L’accès à ces informations sera gratuit pour les usagers. Décret n° 2017-1269 du 9 août 2017 modifiant des dispositions de la partie réglementaire du code du sport http://bit.ly/2iQwks5

 

Appel public à la générosité : les règles

 

L’ordonnance du 23 juillet 2015 a remplacé l’ancienne notion d’« appel à la générosité publique » (AGP) par celle d’« appel public à la générosité » (APG). Le décret du 6 mai 2017 précise davantage le régime juridique des associations, des fondations, des fonds de dotation et des organismes faisant appel public à la générosité.

 

Définition

L’APG est défini comme « la sollicitation active du grand public dans le but de collecter des fonds destinés à financer une cause définie » (par voie d’affichage, de presse, audiovisuelle, par Internet, etc.). Pour être légale, la collecte doit être prévue dans les statuts de l’association et doit soutenir une cause scientifique, sociale, familiale, humanitaire, philanthropique, éducative, sportive, culturelle ou concourant à la défense de l’environnement.

 

Déclaration préalable obligatoire
L’association doit faire une déclaration préalable auprès de la préfecture du département de son siège. Le nouveau décret n’ayant précisé aucun seuil de sommes collectées au-delà duquel une déclaration est obligatoire, il faut en déduire que la déclaration s’impose quel que soit le montant des dons collectés au cours de l’un des deux exercices précédents ou de l’exercice en cours. Si une association effectue plusieurs appels successifs au cours d’une même année civile, elle effectue une seule et unique déclaration. Mais si ces campagnes poursuivent des objets différents, la déclaration doit en faire état.

 

Objectifs
Les objectifs de l’appel sont aussi précisés dans la déclaration. Si l’appel est mené conjointement par plusieurs associations, les conditions de répartition des ressources collectées seront spécifiées. Il existe un modèle type, édité par le ministère de l’Intérieur, qu’il est recommandé d’utiliser. Attention, les dirigeants d’association qui ne satisfont pas à l’obligation de déclaration ou de communication des comptes, encourent une amende de 1 500 €, montant porté à 3 000 € en cas de récidive.

 

Compte d’emploi des ressources
Le décret du 6 mai 2017 n’ayant également précisé aucun seuil concernant l’obligation d’établir un compte d’emploi des ressources collectées auprès du public, il est donc obligatoire (un seuil devrait être défini prochainement par décret). Ce compte d’emploi est déposé au siège social de l’association et est porté à la connaissance du public par tous moyens. L’association doit en outre établir des comptes annuels comprenant : un bilan ; un compte de résultat ; et une annexe (incluant le compte d’emploi annuel des ressources collectées auprès du public). Enfin, le compte d’emploi annuel est soumis à des règles de présentation fixées par arrêté ministériel : un modèle est disponible (http://bit.ly/2ApeKCD).

 

Quêtes publiques
Les associations peuvent organiser des quêtes après avoir obtenu une autorisation. S’il s’agit d’une quête nationale, l’autorisation est délivrée par le ministère de l’Intérieur. Une liste des journées nationales avec le nom des organisations autorisées est publiée au JO. Au niveau départemental,/nbsp]c’est le préfet qui donne l’autorisation, ou le maire s’il s’agit d’une quête communale. Le montant et l’utilisation des sommes reçues doivent être déclarés au moyen d’un formulaire. Attention : sauf dérogation, les quêtes en porte-à-porte au domicile des particuliers sont interdites. 

 

En savoir plus : http://bit.ly/2nogh6O

 

Modèle de déclaration : http://bit.ly/2jMo617

Lettre d'information "France Défi Associations"